LA CASTE DES MAÎTRES BÂTISSEURS DE SUDRAM

Caste -bâtisseurs-





      - L’Académie des Angles

    - Les Maîtres des nervures

     -     Les Maîtres fragmentaires

     -     Les Maîtres verriers

     -     Les Maîtres arpenteurs

     -     Les Maîtres infiltrateurs

     -     Les Maîtres architectes

     -     Les Maîtres Opale






Dans le ciel apparut Lübn.

Pour la première fois. Et lors de sa première apparition, Lübn frappa Derio si violemment, que le Monde de Derio en fut transformé à tout jamais. La météorite s’échauffa à l’approche du sol, plongeant ce monde pris de stupeur dans une terreur sans nom. Puis vint l’impact. Les océans bouleversés, l’écologie modifiée, les terres retournées. Suite au cataclysme, il fallut de nombreuses années avant que le ciel ne réapparaisse. Et quelle ne fut pas la surprise de tous les survivants à la surface de Derio de découvrir que dans le ciel, là où tournaient déjà dix tellèmes sur des cycles réguliers, Lübn s’était invité et passait régulièrement dans le ciel pour ouvrir l’année. Il fut tout de suite considéré comme un nouveau tellème, puisque la météorite tournait maintenant après s’être écrasée sur le monde. La magie des tellèmes était bien là.

Et cette magie, certains survivants décidèrent que le signe était suffisamment fort pour ne pas laisser passer leur chance de comprendre le phénomène.

Un petit groupe venu de plusieurs horizons décida de monter une expédition pour remonter aux origines de Lübn. Ils prirent pour référence le point d’impact. Leur recherche devait débuter là où Lübn avait rencontré Derio sur le continent Labbat-Hankar. Personne n’avait encore osé s’aventurer là où la météorite avait créé des montagnes, soulevé la terre et la roche comme une onde concentrique autour du point de contact. Ces explorateurs agrégeaient populations, libres agissants et penseurs autour de leur projet. La progression serait longue, et les enjeux qui se dessinaient faisaient rêver ces explorateurs d’un nouveau temps.

Bien vite, ils comprirent que l’essentiel de leur travail serait de trouver un moyen pour creuser. L’enjeu s’était précisé. S’il fallait trouver quelque chose, c’était le cœur du météorite qui s’était enfoncé dans le sol de Derio. Là serait sans doute la clef de compréhension de ce monde. Sans oublier que la connaissance et la possession de cette matière unique serait une arme physique et politique certaines. La professionnalisation et le but de ce grand projet donnèrent naissance à la première  forme de cette caste appelée simplement les Maîtres Bâtisseurs.

Pendant plusieurs centaines d’années, ils creusèrent dans le sillon de Lübn, s’enfonçant dans la roche, plus loin, plus loin encore. Ils continuaient à trouver des pistes qui leur confirmaient que Lübn avait progressé au cœur du monde. Alors il leur fallut trouver un nouveau protocole, plus efficace que de creuser un tunnel à la force des bras, procédé trop lent et trop coûteux en vies humaines. Ainsi ils créèrent la Grande Vrille. Un bâtiment modulaire, formé d’un foret gigantesque, tournant sur un axe autour duquel un plateau mobile supportait des structures d’habitation. Avec les siècles, la Grande Vrille croissait, s’enfonçait plus loin, jusqu’à ce que plus personne à la surface ne sût ce qu’il se passait en dessous.

Le système de la Grande Vrille trouva ses limites, car l’alimentation de la surface devenait impossible. Les Maîtres Bâtisseurs, aux alentours de 1000 du Sham-Anthyr, décidèrent de fonder une cité souterraine qui serait l’avant-poste de la Grande Vrille. Ainsi fut fondée Sudram, et le nom définitif de la caste : les Maîtres Bâtisseurs de Sudram. La Grande Vrille pouvait poursuivre sa progression.

Accéder à Sudram est déjà une prouesse. Aujourd’hui encore, il faut utiliser des transporteurs Rohrk pour la rejoindre. À Sudram, un tunnel part au loin, et plus personne ne sait où en est la Grande Vrille. Ses habitants doivent être auto-suffisants, ou ont simplement disparus. De toute cette grande histoire ne reste de visible que Sudram, cité étrange et reclue, mais à l’intérieur de laquelle les Ordres se sont développés, venant de la surface, et constituant un véritable lieu de pensée politique et économique sur Derio. L’accès étant compliqué, il faut aux visiteurs occasionnels de Sudram rester pas loin de douze cycles complets avant de pouvoir remonter à la surface. Cela oblige tout visiteur à optimiser sa venue. Ainsi, Sudram est devenue une sorte de cité-test pour les Ordres et les Castes. Un système de gestion propre à Sudram fait que le pouvoir politique s’est organisé autour d’une direction Pentarchique de la ville, qui n’est pas sans représenter les enjeux politiques de la surface. On y retrouve bien évidemment les Maîtres Bâtisseurs, les Schistes de Maurabis, les Tyrans de Sarnath, la Missia Facten et le Mandiburu. Mais ça, c’est une autre histoire.

C’est au sein de Sudram que s’est constitué le pouvoir des Maîtres Bâtisseurs. On a d’ailleurs du mal à en mesurer l’étendue réelle, sinon que l’on peut quantifier l’ampleur de leurs réalisations. Jusqu’à présent, on peut dire qu’ils possèdent un pouvoir de savoir-faire jalousement gardé, plus qu’un pouvoir guerrier ou diplomatique. Ils usent et abusent de leur pouvoir politique, utilisant leurs constructions comme un levier puissant de pression contre toutes les autres Castes. Leur puissance leur confère une certaine condescendance. Maintenant, de tout ce qu’ils préparent depuis des millénaires, il leur serait possible à terme d’exercer (et c’est leur volonté) une domination totale et incompressible.

Tous les sous-ordres découlant de la structure mère sont nés de la recherche de Lübn à force de creuser plus profond dans le sol. Toute la philosophie architecturale développée par les Maîtres Bâtisseurs est axée sur l’idée de structures mobiles vouées à la sédentarisation. C’est toute la mécanique de la Grande Vrille.

L’académie des angles est la pierre de voûte de la structure Bâtisseurs. C’est le lieu privilégié de leur formation. Personne ne peut prétendre à progresser dans la Caste sans passer par cette académie. La plus importante se trouve à Sudram, évidemment. C’est une formation de quatre années au cours desquelles le Bâtisseur s’oriente vers l’une des spécialisations architecturales.

Le terme d’angle est fondamental chez les Bâtisseurs. En effet, ils estiment qu’en terme de structures architecturales, celui qui comprend la physique de la répartition des masses reportées sur les angles a tout compris. Même si le mouvement de leurs structures repose majoritairement sur des principes de roulement à billes, ou d’axes et de rotations, ils estiment que le plus important est le rapport force/contre-force formant des angles, et permettant de mettre en équilibre ce qui ne devrait pas tenir en temps normal. Ils poussent ainsi le vice à mettre en équilibre de la pierre sur des structures en verre, construire des canalisations à structure variable, en pierre, déplaçables par des structures de bois, etc… Ainsi, leurs spécialisations sont fonction des matières.


LES MAÎTRES DES NERVURES

Sont experts dans l’art de manipuler le bois. Leur talent fut de découvrir que le bois, en fonction de ses nervures, se fragilisait avec les contre-forces qui s’exerçaient dans leurs constructions. Leur vint l’idée de bâtir des structures directement dans les forêts, avec du bois encore vivant, et dont on torture la matière première pour la plier aux exigences de solidité et de souplesse. Une construction de grande noblesse peut prendre plusieurs siècles. Ainsi les Bâtisseurs sont bien souvent les seuls à faire des constructions de cette difficulté technique. Lors de l’achèvement de la construction, les Bâtisseurs inoculent une substance dans l’arbre ou les bois de construction pour que ces derniers continuent à être actifs et réactifs même une fois désolidarisés de leurs troncs. Le bois garde sa souplesse naturelle, tout en épousant leur forme de destination.


LES MAÎTRES FRAGMENTAIRES,

eux, maîtrisent la pierre. Leur recherche la plus pointue vise à trouver le moyen de rendre la pierre aussi souple qu’un roseau.

C’est à force de regarder une pierre ponce, raconte-t-on, qu’un Maître fragmentaire trouva le moyen, sans changer le poids d’un bloc de pierre, de le rendre supportable par toute autre matière.

Déjà, les Fragmentaires sont passés Maîtres dans la taille de la pierre. Le principe est d ‘évincer le plus possible de matière sans toucher aux structures porteuses. Ils obtiennent ainsi des dentelles de pierre dont on a peine à croire que cela puisse tenir.

Mais leur coup de génie est encore bien plus grand ; les Fragmentaires, mis par la théorie des angles, trouvent le moyen d’imbriquer les dentelles de pierre pour former une sorte d’immense puzzle en volume, où toutes les pierres jouent entre elles sans jamais se désolidariser. C’est l’imbrication concomitante de trois pierres reposant sur deux angles des deux autres pierres qui permettent un équilibre constant mais solidaire entre les blocs.


LES MAÎTRES VERRIERS

Comme leurs confrères, se jouent du verre en utilisant les fragilités de cette matière pour en faire une force.

Le verre soufflé est utilisé dans toutes les constructions. Une fois la pièce soufflée, le grand art est de la briser sous l’action de la sève des arbres traités dont ils récupèrent le liquide en faisant de fines saignées comme avec l’arbre à caoutchouc. Une fois la sève récupérée, elle est chauffée jusqu’à ébullition puis versée à l’intérieur de la pièce soufflée. Celle-ci éclate, Mais la sève prend tout de suite la place du verre. Si du verre éclate, c’est aux endroits les moins solides, donc la sève crée des angles multiples qui sont des fortifications du verre. Cela devient une force, car les jonctions sont souples et élastiques, aidant alors la pièce de verre à résister à des pressions, des compressions ou des étirements. La sève, agissant comme un filetage au plomb, peut, suivant la qualité du travail, être aussi fin qu’un cheveu ou gros comme un doigt. Cette technique est aussi utilisée pour confectionner des vêtements dont la résistance est proche des armures. Certaines femmes se parent de ces vêtements de verre, d’une délicatesse sans pareille.

Le gros du travail des Maîtres Verriers consiste à prévoir la forme qui éclatera. Le souci avec les pièces de trop grande envergure force les Verriers à se surpasser, fabriquant même des colonnes aux dimensions colossales.


LES MAÎTRES ARPENTEURS

Dont l’essentiel de l’activité est de repérer la qualité et la viabilité des terrains, se sont surtout spécialisés dans l’analyse des terrains difficiles, voire impraticables. Leur plaisir est de pouvoir construire là où c’est impossible. Les sols sismiques, les terrains boueux et meubles, etc…

Ils sont aussi chargés de la pose des premières pièces d’étais servant à la future construction.


LES MAÎTRES INFILTRATEURS

Réalisent les constructions, et doivent être des maîtres de l’enduit et des différents liants qui feront la fiabilité de la construction. Ils tirent leur nom de leur capacité à infiltrer toutes les anfractuosités de la structure, et placer les angles maîtres, des pièces minuscules et mobiles qui empêchent les constructuions de se fragiliser, voire, quand ces éléments sont bien placés, de rendre les bâtiments quasi-invulnérables. Ces pièces en pierre, en forme de deux triangles entrecroisés perpendiculairement, détiennent la clef de la robustesse des bâtiments.


LES MAÎTRES ARCHITECTES

Sont la crème de la Caste des Bâtisseurs. On accède à ce titre lorsque l’on a progressé suffisamment au sein des autres sous-castes. Les Architectes conceptualisent les nouveaux bâtiments, et doivent bien sûr maîtriser les différentes étapes de la construction. Ils sont là aussi pour apporter le progrès technique suffisant pour repousser en permanence les limites du constructible.

On distingue d'ailleurs un sous-Ordre parmi les Maîtres Architectes, sous la dénomination de Maîtres des Arcs, spécialisés dans les structures souples, et surtout de travailler les Angles Maîtres afin de ne réaliser que des courbes dans l'architecture, d'où leur nom. Ils sont une sorte de recherche et développement et se distillent dans les équipes dirigeantes lors de la réalisation des chantiers.

Avec le temps, ce sont des Maîtres Architectes que proviennent les diplomates de la Caste, et sont utilisés pour toute la partie visible de l’iceberg des Maîtres Bâtisseurs. Les transactions, les partenariats, les contrats, les commandes.


LES MAÎTRES OPALE.

C’est la plus obscure des formations de la Caste. Ils s’occupent à la fois de la bonne fabrication des sphères, ils enrichissent les Angles Maîtres pour qu’ils soient le liant si précieux des bâtisses, et surtout les alchimistes qui préparent la sève qui configure tant de choses. C’est pour cette dernière qu’ils sont particulièrement importants.

Ils portent ce nom car ils se sont fait greffer une opale enchâssée dans le cœur, pour prouver leur allégeance au dogme de la construction en dur. On les dit assez taciturnes quant à leurs activités. Un grand nombre de hauts dignitaires de cette Caste sont des Elfes, chose peu courante chez les Bâtisseurs, ce qui explique leur facilité à manipuler la sève, et aussi à leur attirer une certaine inimitié de la part de leurs consœurs et confrères.